Grâce au « Forum citoyen pour l'alternance », la société civile peut s'exprimer. Notre devoir est de l'écouter. Hier soir à l’auditorium de la Maison du Tourisme, près de 200 personnes ont débattu dans d'excellentes conditions de participation : Kitty Lequesne et Thomas Bonzy présentaient une vingtaine de propositions tirées au sort parmi toutes celles qui émanent des ateliers, en présence de Charles Descours et Guy-Pierre Cabanel, Conseillers Généraux de la 1ère circonscription.
Il faut rendre hommage aux rapporteurs (1) pour le travail considérable effectué, coordonné par Henri Baile. On mesurait hier combien les échanges ont été animés, positifs, et soulignent les attentes des citoyens.
Pour ma part, j'ai surtout tendu l'oreille : il faut savoir écouter. Je crois que ce que nous avons initié avec ce « Forum » depuis mai 2006 relève d’une nouvelle morale de l’action.
J'ai simplement indiqué à l'ouverture que notre démarche apporte quatre changements majeurs qui sont intimement liés. Tout d’abord, c’est la reconnaissance du rôle irremplaçable du contenu. La vie publique doit demeurer le terrain du choc des idées. Pour qu’il y ait des idées, il faut qu’il y ait du contenu. Ensuite, ce contenu doit être mis en perspective. Et alors s’ouvre la bataille du sens. C’est une bataille trop souvent négligée. Un bon contenu n’est pas seulement une liste de propositions précises, concrètes couvrant les principales questions. Un bon contenu va au-delà. Le sens devient la mise en signification des mesures vers une finalité qui les dépasse et qui leur donne alors toute leur dimension. Puis, troisième changement, et c’est là à mes yeux une originalité forte de nos travaux, nous avons volontairement ramené le sens des mesures à la fonction du citoyen.
Quand j'emploie le mot « ramener » ce n'est pas « réduire » les mesures. C’est introduire une nouvelle logique qui est celle de la responsabilité de chacun, la responsabilité individuelle. Chacun a son rôle dans la décision. Chacun a son rôle dans l'action. Dans les années 90, bien avant le film d'Al Gore aujourd'hui, j’avais ressenti cette évolution. Aux Etats-Unis, l'une des plus grosses ventes en librairies était sur le thème « des 100 gestes pour sauver la planète ». Il ne s'agissait pas de 100 gestes d’Etat mais de 100 gestes de citoyens, chaque jour à chaque moment, au bureau, à domicile.
Les solutions n'émergeront pas de collectivités à la dimension démesurée. Elles proviendront de l’action de chacun. Nous sommes donc à l'aube d'une nouvelle citoyenneté. C’est cette logique que j'ai exposée avec mon livre intitulé « demain nous appartient ». Cette formule montre qu’après l'emprise du collectif sur l'individuel, nous allons assister à un retour de l'individuel.
Ce retour n'est possible que si chacun est impliqué à chaque étape du processus. C’est donc une exigence de nouvelle pédagogie permanente. Il ne s'agit pas d'annoncer ce qui serait à comprendre encore moins ce qui serait déjà décidé. C’est l'idée de la confiance et de l'ouverture à autrui dans un débat d’égal à égal. C'est un vrai enjeu de mentalité qui fait imploser les frontières politiques traditionnelles. Sous cet angle et à condition de bien respecter chacun de ces principes, il me semble que les travaux du « Forum » ont constitué l'avant-garde d'une nouvelle dynamique de la citoyenneté moderne.
Ce constat m’amène au 4ème changement porté par ce « Forum » : le progrès doit demeurer l'expression de la volonté de diriger une évolution. L'agglomération grenobloise est souvent victime désormais de deux dérives. La première est celle d'un pseudo déterminisme technique. Quand ce déterminisme existe c'est déjà une première forme de marginalisation des élus donc des citoyens.
La seconde dérive c'est de cautionner, d'alimenter la conception anecdotique de la vie publique ; plus qu'anecdotique, je dirais même « parasitaire » de la vie publique : les querelles personnelles, les annonces sans lendemain. Ces deux dérives sont le creuset de la crise de confiance et de participation qui frappe l'opinion Française.
(1) La liste des rapporteurs du « Forum citoyen pour l'alternance » : Pour un pouvoir mieux partagé, Philippe Bedouret et François Gilabert ; Pour une dépense publique rationnelle et juste, François Vercruysse et André Xibéras ; Pour un environnement respectueux de la qualité de vie, Annick Chabert et Yves Pauleau ; Pour un bassin grenoblois moteur des Alpes Françaises, Bernard Foray et Jean-Louis Tane ; Pour un regard différent sur les valeurs du sport, Isabelle Blanc, Marine Lazarotto et Isabelle Marziou ; Pour l’aboutissement d’un schéma réaliste et opérationnel des voies de communication dans l’agglomération, Alain Bonnet et Jean-Claude Peyrin ; Pour mieux lutter contre les différentes formes de disqualifications et de précarité, Catherine Bolze, Hervé Gerbi et Jean-Placide Tsoungui ; Pour un territoire à l'écoute des jeunes, Rachida Abdelkader, Samira Benhaddou, Jérémie Borj et Michel Madrigal ; Pour une information partagée respectueuse du citoyen, Thomas Bonzy et Anne-Valérie Pinet ; Pour un vrai partage de la connaissance, Guy Issanjou et Olivier Ellena.
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